Lorsque la journée commence mal... [Terminé]

Spoiler:

L’absence des parents de Sayako avait du bon à ses yeux. Elle pouvait déambuler dan la maison sans se soucier de la présence de sa mère, son père n’étant presque jamais là, elle était déjà habituée à sa faible présence. Elle avait donné quelque jours de congés à leurs employés, ainsi qu’aux cuisiniers. La jeune fille n’avait certes jamais eu besoin de se soucier de tout cela, elle n’avait pas besoin de faire la cuisine, le ménage… Mais elle était capable de le faire, si bien que depuis quelques jours, elle faisait la cuisine elle-même. Sayako ne mangeait pas énormément, mais elle mangeait bien, et beaucoup plus qu’avant, et pour elle, et aux yeux de ces médecins, c’était un grande pas, son corps n’était pas encore très bien réhabitué à ingurgiter de la nourriture. La jeune femme restait encore un peu maigre, mais elle avait tout de même presque repris son poids habituel, qui était déjà bien léger .

Ce matin là, la nippone se leva, coiffa un peu ses cheveux courts, ne se maquillant que légèrement, comme toujours. Elle enfila rapidement une tenue qu’elle avait à porté de main, faisant instinctivement attention à ce que les vêtements cachent un peu ses formes trop fines sans pour autant dissimuler sa féminité .Sayako avait toujours été un peu coquette, qualité ou défaut hérité de sa mère, ancienne mannequin. Avant de partir, la jeune femme fit une liste des courses qu’elle avait à faire. Des fruits, des légumes, des nouilles, des pâtes fraîches pour faire un plat italien, elle en avait envie… Au final, il n’y avait pas grand-chose, Sayako pourrait même se permettre de faire quelques boutiques de vêtements s’il y avait quelque chose de jolie à Kamata… D’un geste, elle prit les clés de sa petite voiture, ainsi qu’un sac pour y mettre ses quelques affaires. Très vite, l’habitacle de la petite voiture fut envahie par une musique rock , Sayako conduisant avec attention mais assez rapidement, comme toujours. Elle prenait toujours cette voiture lorsqu’elle devait faire les boutiques, les voitures de sport et les chauffeurs, c’était pour les occasions un peu plus grandes… Ou lorsqu’elle en avait envie.

Arrivant au centre commercial, Sayako se gara après avoir failli écraser le sac d’une vieille femme. La journée ne commençait pas très bien… Avec un soupire, elle chassa cette pensée et coupa la musique, sortant de la voiture de ville pour aller au cœur même du centre commercial. Finalement, elle trouva une jolie robe et quelques hauts avant d’aller faire les courses alimentaires. Elle n’avait pas eu envie de gâter ses légumes et ses fraises dans les magasins… Après avoir passé deux bonnes heures à flâner, perdant son temps dans les magasins -chose qu’elle faisait seulement lorsqu’elle était seule-, Sayako finit par se décider à rentrer. Elle avait un repas de midi à préparer, et un devoir à faire ! Mais elle n’avait pas prévu qu’elle allait être retardée par une main se posant sur son épaules…

« Dis donc toi, tu es vraiment mignonne… Tu viens faire un tour avec nous? »

Le type même du garçon tenace et désagréable… Enfin « du garçon »… Des garçons car ils étaient trois, mains dans les poches, portant l’uniforme d’un lycée autre que Sakurai et qui n’était pas très bien côté à Tokyo… Définitivement, la journée n’avait pas bien commencée, et elle ne se continuait pas bien…

« Non, je ne viens pas… Excusez moi... »

Sur ces derniers mots, Sayako dégagea son épaule, prête à partir. Elle n’avait aucune envie de se faire ennuyer encore plus longtemps par ces trois là… Surtout que les passants regardait le petit groupe mais ne réagissait pas… Alors qu’elle commençait à s’éloigner, une main ramena la petite femme un peu trop brusquement en arrière, si bien qu’elle laissa tomber son sac de provisions au sol.

« On t’a demandé de venir. »

La voix était plus ferme, la poigne aussi.

« Et j’ai dit non! »

A nouveau, personne ne tenta de s’interposer alors que Sayako se débattait pour que la main lâche son bras, ou au moins pour atteindre son portable alors que les trois jeunes hommes riaient, amusés par sa tentative de fuite. Dans quoi s’était-elle fourrée encore?

Comment souvent, Keiji s’ennuyait. Tout le blasait, rien ne l’intéressait. Dans ces moments là, il restait chez lui à ne rien faire, dormant le plus souvent. Au moins, quand il dormait, il avait la paix. Du moins c’était ce qu’il croyait. Aujourd’hui, Junpei l’avait appelé. Il avait dû avoir vent de la petite scène en labo de chimie le jour d’avant et avait maintenant la mission « d’occuper » le grand Keiji blasé de toujours. Son plan génial? Le traîné dans un de ses centres commerciaux.

Pour ce qui était d’intéresser Keiji, il y avait mieux. Junpei devait si rendre par affaire, y rejoindre son père pour un truc que Kei n’avait pas pris la peine de retenir et en attenant, son ami avait jugé bon de l’extraire de son lit pour lui faire se dégourdir les jambes. À croire que Keiji était un chien =___=’

Par contre, il n’y avait aucun moyen de détourner un Mayuko de son but lorsqu’il en avait un, voilà pourquoi Keiji se retrouvait dans une boutique de vêtements, baillant en faisant exprès de faire du bruit, juste pour rappeler à Junpei qu’il lui avait coupé de son précieux sommeil. Ce qu’il eut en réponse? « La ferme et essaie ça! » en se faisant plaquer une chemise contre le torse. Juste assez fort pour lui couper le souffle un peu. Ce satané Junpei il le retenait è_é

Mais la chemise était classe et jolie, normal puisqu’elle avait été choisie par Junpei, alors Keiji ravala sa vengeance et alla l’essayer. Après tout, on dit que la vengeance est un plat qui se mange froid. Kei aurait tout le loisir de l’exercer plus tard, héhé.
Ce fut avec une nouvelle chemise que Keiji quitta la boutique et Junpei qui devait maintenant rejoindre l’administration. Il était temps! Le jeune homme pourrait enfin rentrer chez lui retourner dormir.

Quel programme! Mais c’était la seule chose que quelqu’un qui n’était stimulé par rien pouvait faire pour passer le temps. Puis, Keiji était plutôt doué pour dormir! Il avait beaucoup d’expérience en la matière maintenant. Si seulement le gouvernement en faisait une matière scolaire. Ça en serait une ou Keiji dépasserait Junpei sans problème!
Mais pour en revenir à l’actuelle situation, Keiji sortait du centre mains dans les poches, traînant son achat avec lui d’un pas morne et sans but. Il lui restait à appeler son chauffeur, mais comme il n’avait rien de précis à faire, il marcherait sûrement un peu. Contre toute attente, lorsqu’il était éveillé, ça lui arrivait de vouloir se bouger un minimum.

Sortant donc du centre commercial, il avait vu plusieurs regards tous dirigés au même endroit et des voix s’élever. Apparemment, il y avait confrontation houleuse là devant. Un couple qui faisait une scène? Ma foi, ça pouvait être drôle. Il pouvait peut-être même en rajouter une couche en invitant la demoiselle à aller boire un thé avec lui! Question d’empirer les choses, héhé. Avec un sourire flottant sur ses lèvres, il arriva au devant de la scène lorsque le garçon revenait à la charge. Ou plutôt les garçons puisqu’ils étaient trois. Ce fut ensuite que le regard sombre de Keiji se porta sur la fille. Sayako?
Keiji détourna les yeux un instant avant de les ramener sur l’action au moment ou son ancienne amie refusait une fois de plus l’invitation. Personne ne levait le petit doigt bien qu’ils regardaient tous. Kei aurait fait pareil en d’autres circonstances, mais même s’il était en froid avec Sayako depuis son retour, il ne pouvait pas la laisser bêtement se faire harceler plus longtemps par ce trio d’imbécile.

-Tsss, kuso.

Marmonna-t-il pour lui-même. Le voilà qui se transformait en héro de drama pour adolescentes… Espérons que personne qu’il ne connaisse ne voit ça. Quittant les spectateurs pour entrer dans le jeu, Keiji laissa son sac contenant sa nouvelle chemise près de celui que Sayako avait échappé. Le tout très calmement avec un visage totalement inexpressif. Ça, il tenait ça de Junpei. L’inexpressivité avait le don de mettre encore plus la pétoche que la colère par moment. Mais ce n’était bien sûr pas suffisant pour ces imbéciles. Qu’est-ce qu’ils croyaient, qu’on s’attire les grâces d’une femme par la force? Il fallait sortir les gars. L’homme des cavernes était disparu depuis belle lurette.

-Aaaah l’homme de bas niveau à le même problème partout,

se moqua Keiji en approchant le groupe, portant à sa bouche un petit sourire qui ne fit que mettre en rogne les assaillants de Sayako.

-Il ne sait jamais faire la différence entre un oui et un non.
-Toi tu devrais apprendre à te mêler de tes affaires!
-Et toi tu devrais apprendre la galanterie. D’abords,

expliqua Keiji en serrant le poignet du type suffisamment fort pour qu’il relâche Sayako,

-on ne doit pas lever les mains sur une fille, ça les effraie et ce n’est pas génial pour s’attirer leurs faveurs. Ensuite quand elles disent non, tu ne discutes pas et tu te casses.

Acheva le jeune homme en repoussant brutalement celui qui avait attrapé Sayako par le bras.

-À moins que tu ne préfères en discuter avec la police? Parce que, tu savais que la brutalité ce n’était pas très éthique?

Et curieusement à la mention de la police les trois imbéciles préférèrent ne plus se donner en spectacle. La menace étant écartée et n’ayant rien de spécial à dire à Sayako, Keiji ne fit que croiser son regard brièvement alors qu’il retournant aux sacs par terre, se penchant pour ramasser le sien…

Si elle avait su à l’avance ce qu’il risquait de se passer, Sayako ne serait certainement pas sortie ce matin là. Mais voila, elle n’avait pas de dons de voyance, elle n’avait pas de visions, elle ne détectait pas les signes, rien de tout cela. D’un pas léger, malgré l’incident sur le parking, elle s’était rendue au centre commercial, en ressortant avec cette jolie petite robe rouge qu’elle avait déjà remarquée. C’était très rare qu’elle porte de telles couleurs, et aujourd’hui même elle était plutôt dans les tons noirs et gris, même si comme souvent, son visage pâle suffisait à illuminer la tenue.

Sayako n’était plus vraiment la jeune fille que Keiji avait connu, du moins physiquement parlant. Elle avait maigri, certes, puis repris du poids, ce qui se voyait quand on la voyait en sport -ce qu’elle évitait toujours- ou chez elle, endroit où elle ne faisait pas attention à cacher sa silhouette… Mais surtout , son visage s’était affinée, avait pris des traits plus adultes, plus matures… Peut-être était-ce la maladie qui avait provoqué cela, peut-être était-ce tout simplement le temps. Elle avait changé, c’était certain, et pas que physiquement. Elle ne restait plus avec ces fréquentation féminines qu’elle avait avant, et restait, dans la 3-C, avec des filles plutôt simples maintenant. D’autres, comme Keiji, n’avait pas apprécié le départ précipité de la jeune femme, mais elle ne pouvait pas leur dire qu’elle avait été hospitalisée avant d’être envoyée à l’Institut… Sa mère avait déjà menti pour elle , que pouvait-elle dire maintenant? Pouvait-elle, innocemment, annonçait qu’elle n’était pas en Amérique, qu’elle avait plongé dans l’anorexie? Elle ne savait même pas si elle voulait que quelqu’un soit au courant.

Pourtant, si elle voulait tenter de récupérer l’amitié de Keiji, elle devait lui dire.

Sayako y avait déjà pensé, elle comprenait que le jeune homme lui en veuille autant. C’est à peine s’il lui avait adressé un regard depuis son retour, et la jeune femme n’avait pas encore trouvé les mots pour tenter une approche pacifique… Elle avait peur, vraiment, de lui expliquer, elle ne savait pas si elle serait à même de prononcer les seuls mots « d’anorexie » ou « d’Institut ». Elle n’en savait rien, mais ce qu’elle savait, par contre, c’était qu’elle ne souhaitait pas perdre l’amitié du jeune homme, du moins elle voulait la récupérer. Lors de leur première année, Sayako avait été très touchée que Keiji lui accorde sa confiance, c’était rare qu’il le fasse envers une femme. Mais ils s’étaient bien entendus, ils s’étaient rapprochés et… Sayako était partie. Elle savait qu’à l’époque, elle avait trop honte de ce qu’elle était devenue pour oser en parler à qui que ce soit, alors à quelqu’un qu’elle estimait… ? Oui, elle aurait du mettre sa fierté de côté mais elle était ainsi.

Alors lorsqu’elle le vit s’approcher, elle ne put s’empêcher de le regarder à la fois avec étonnement et bonheur. Alors il n’en avait pas rien à faire de son sort? Bien sûr que non, Keiji n’était pas ce genre de personne, elle le savait très bien…

Les mains qui s’étaient posées sur ses bras la lâchèrent et elle ne réagit pas tout de suite, n’ayant pas suivi l’échange même si tout cela lui avait donné l’impression d’être dans un de ces dramas qu’elle regardaient lorsqu’elle avait du temps à perdre à l’Institut. Dramas pour adolescentes, bien évidemment. Mais avant qu’elle n’ait eu le temps de faire quoi que ce soit, Keiji la regarda un instant et s’approcha des sacs tombaient à terre pour ramasser le sien. Sayako serra un peu plus son manteau autour d’elle et s’accroupit à côté de lui pour pouvoir ramasser son sac de provisions.

« Merci, Keiji. »

Sayako se mordit légèrement la joue avant de lever les yeux vers lui.

Lorsque le jeune homme se redressa, elle fit de même, se doutant que si elle souhaitait lui parler, c’était le moment. Peut-être pas le lieu, mais en tout cas le moment, et elle n’aurait pas vraiment de nouvelles occasions de l’avoir sous la main… Elle le regarda, se plaçant devant lui alors qu’il allait partir, une main sur le devant du bras de Keiji, levant le visage vers lui. Sayako était définitivement toujours plus petite que ses amis masculins.

« Est-ce que tu aurais un peu de temps? J’aimerai te parler… »

Elle se mordit légèrement la lèvre, comme quand elle était gênée, ou quand elle hésitait.

« T’expliquer… »

Elle ne pouvait pas être plus clair pour le moment sur ce qu’elle voulait lui dire, et elle se doutait qu’il comprendrait. Même si parfois Keiji faisait des choses stupides, Sayako savait qu’il était loin d’être un imbécile… Et elle espérait surtout qu’il lui laisserait une chance…

Penché là, son sac entre les mains, Keiji restait accroupi, le regard un peu dans le vague. Il entendait le remerciement de Sayako comme s’il était en sourdine. Il revoyait ce moment où la mère de Sayako lui avait dit qu’elle était partie pour les USA. Il lui avait demandé pourquoi, mais aucune réponse n’avait été satisfaisante. Surtout, pourquoi Sayako était-elle partie sans le prévenir? C’était avant tout la question sans réponse qui l’avait tourmenté pendant tout ce temps. Un tourment qu’il avait gardé pour lui, il n’en avait parlé à personne, pas même à ses meilleurs amis.

Sur le coup, il s’était trouvé profondément stupide d’avoir cru que Sayako était différente et sa fierté habituelle l’avait empêché de se confier aux autres. Oui, Keiji avait été blessé, c’était comme une trahison pour lui et cette fois était de trop. Si l’histoire avec sa mère l’avait profondément touché, cette disparition sans la moindre explication de Sayako avait détruit le peu de confiance qu’il avait réussi à se reconstruire entre temps. Depuis, il n’essayait même plus de reprendre le dessus, s’enfonçant dans son blasement perpétuel, restant ce fils de riche capricieux qui avait comme distraction principale d’emmerder toute âme qui se trouvait face à lui.

Un tableau plutôt noir de ce petit prince qui a tout pour lui, mais même s’il semblait constamment s’amuser comme un fou à torturer les gens qui l’entouraient, Keiji était, en réalité, plutôt vide et lasse de tout. Il ne savait plus quoi faire, où se diriger. Pourtant, la route était tracée pour lui depuis sa naissance. De grandes études, reprendre l’entreprise de son père. Être riche à ne plus savoir quoi faire de son argent… Une vie qui ne lui semblait pas si alléchante que ça. Tout ce qui avait détruit Keiji était de la faute de l’argent, il aurait préféré ne pas naître dans ces conditions.

Mais tout ceci ne faisait pas réellement parti du sujet. Revenant à lui après s’être perdu légèrement dans ses pensées, il s’était redressé prêt à partir après avoir marmonner un petit :

-Y’a pas de quoi.

Il n’avait pas réellement envie de remuer les choses du passé, ayant toujours adopté la superbe tactique de l’évitement. Ce n’était pas très courageux, mais ça lui évitait bien des soucis. Le plus simple et le moins contraignant était toujours le mieux selon lui qui avait horreur de se casser la tête.

Du temps. Elle lui demandait du temps, du temps pour parler, pour s’expliquer. Aurait-il la bonté de lui donner ce temps qu’elle réclamait? Difficile à dire. Une partie de lui voulait connaître ses explications, mais une autre ne le voulait pas vraiment. La dernière fois qu’il avait demandé de but en blanc des explications, sa mère lui avait alors répondu qu’elle n’avait plus besoin de lui avant de disparaître complètement de sa vie, il ne l’avait pas revu depuis. Ce genre de chose, lorsque vous avez treize ans, vous marque assez pour vous empêcher de recommencer à demander des explications…

Regardant fixement devant lui pendant qu’il réfléchissait à la proposition, la curiosité gagna finalement la bataille intérieure et Keiji descendit son regard sur l’adolescente qui l’avait empêché de poursuivre sa route.

-Tu as de la chance que je ne sois pas attendu quelque part…

Et lui dire qu’il ressentait le besoin maladif de mettre cartes sur table une fois pour toute? Non, bien sûr que non. Keiji était trop fier… Cette fierté le perdrait un jour, mais tout le monde à ses petits défauts.

Sayako savait comment était Keiji, elle savait qu’elle n’aurait jamais du partir sans le prévenir, sans lui expliquer, de plus, elle lui avait caché son état et elle avait réellement peur qu’il prenne ça comme une trahison de plus. Mais peut-être que cela, il pouvait comprendre qu’elle n’avait pas été capable d’en parler à l’époque, même aujourd’hui, elle ne savait pas comment elle allait lui annoncer ce qui l’avait réellement forcé à partir… Bien sûr, Sayako savait que Keiji était un garçon de confiance. Il avait beau faire l’imbécile, il avait beau taquiner sans cesse les gens, il était un garçon à qui l’on pouvait se confier. Il était capable d’écouter, il était capable de beaucoup de choses que personne ne cherchait à savoir.

Ils étaient dans une école où le paraître était évidemment plus important que tout. De plus, Keiji était en effet l’héritier des Yamamoto, alors beaucoup de jeunes filles avaient tendance à lui tourner autour histoire de faire un beau mariage… Les professeurs n’osaient pas jouer leurs rôles à cause, justement de cet héritage. Elle en avait parlé une fois ou deux avec Keiji, elle comprenait tout à fait qu’il soit las… Il l’était déjà avant qu’elle ne parte, alors maintenant, elle doutait que c’était encore pire… Elle ne s’accordait pas tant d’importance que cela, non, ce n’était pas ça. Elle avait appris à connaître Keiji, savait qu’il prendrait son départ comme une trahison, et savait aussi ce qu’il pensait, du moins un peu, de sa vie de tous les jours… Alors oui, elle s’en voulait, terriblement même, mais ce n’était pas ça qui risquait d’arranger leur situation… Mais peut-être que cette petite altercation, ces trois garçons malpolis pouvait faire changer les choses, ou amorcer un changement…

Sayako regarda Keiji ramasser son sac, elle fit de même et se redressa, se doutant qu’il allait bientôt partir, si ce n’était tout de suite sans lui adresser la parole. L’avait-il regarder qu’elle trouvait déjà cela bien… Alors elle s’était interposée, l’empêchant de s’en aller d’une main sur le devant du bras de Keiji. Bien sûr, elle n’était pas capable, physiquement parlant, de l’arrêter, elle n’avait pas autant de force que lui, elle était bien trop petite en plus. Mais elle souhaitait lui parler , elle lui demandait du temps, oui, du temps. Juste un peu de temps pour qu’ils se retrouvent, un peu de temps pour pouvoir lui expliquer qu’elle n’était pas partie comme une voleuse , enfin, pas réellement de son propre chef. Elle n’avait pas fui en Amérique, elle souhaitait retrouver son ami, même si cela allait être dur, elle le savait, elle s’y préparait de toute manière.

Mais contre toute attente, Keiji baissa les yeux sur elle et elle ne prit pas mal sa réflexion, elle eut plutôt un soupire soulagé en prenant sa réponse comme un « oui ». Elle prononça un « merci » bas avec un sourire reconnaissant et se recula légèrement pour ne pas l’ennuyer plus, reprenant son sac de courses et de vêtements, un sourire doux aux lèvres. Même si rien n’était arrangé, elle était contente que Keiji lui accorde un peu de temps. Elle savait qu’il était un garçon fier, et que ce n’était peut-être pas évident…

« J’allais préparer le repas, tu viens déjeuner? »

Elle leva à nouveau les yeux vers lui tout en tirant ses clés de sa poche. Cela pouvait être étonnant venant d’une personne riche comme elle de la voir conduire et faire le repas elle-même, mais après tout, il s’agissait de Sayako non? Les choses n’étaient pas toujours normales avec elle.

« Ca sera aussi ma manière de te remercier pour… ça… puisque tu as du temps.»

Sayako indiqua d’un signe du menton les trois lycéens qui s’éloignaient et elle eut un soupire. Pourquoi les choses comme ça lui tombait dessus? Même si ça lui permettait de reparler un peu à Keiji, elle se passerait bien de ce genre « d’agression. » Elle attendit tout de même la réponse de Keiji, mais l’excuse du remerciement ne pouvait pas réellement lui laisser d’échappatoire, surtout qu’il avait avoué qu’il avouait ne pas être attendu pour le moment.

Alors Sayako lui indiqua la place de sa voiture, un peu plus loin, et en ouvrit les portes pour le laisser s’installer alors qu’elle rangeait ses courses dans le coffre. Venant s’asseoir du côté conducteur, elle ne mit pourtant pas le contact, son geste s’étant arrêté alors qu’elle venait tout juste d’enfoncer la clé.

« J’imagine que tu as parlé à ma mère quand… je suis partie? »

Elle s’en doutait bien sûr, mais elle préférait savoir… Finalement elle mit le contact, lançant un disque qu’elle écoutait en venant, et qu’ils avaient écouté avant, durant une de leurs virades… Elle ne l’avait pas fait exprès, mais maintenant, elle commençait à angoisser, vraiment. Qu’allait dire Keiji quand il allait apprendre la vérité?

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